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Nous devrions tous être…Chimamanda Ngozi Adichie

Chimamanda Ngozi Adichie est une écrivaine Nigériane qui a fait ses études aux Etats-Unis et qui vit entre Le Maryland et Lagos.

Elle n’a de cesse à travers son oeuvre de faire bouger les mentalités : rendre visible, l’invisible femme noire africaine.


Ce mois-ci plus qu’un portrait, j’ai surtout envie de vous partager sa parole, une parole juste et puissante. Elle a écrit un manifeste qui explique de façon bien plus admirable que je ne pourrais le faire, pourquoi « nous devrions tous être féministes ». Elle y développe des schémas de penser et d’éducation qui perdurent de génération en génération. Ces mêmes schémas qui provoquent à l’âge adulte, un décalage des désirs entre l’homme et la femme, et qui par extension trouve une explication dans les violences faites aux femmes. Loin de moi l’idée de justifier de tels actes, mais il faut bien comprendre comment de tels mécanismes peuvent se mettre en place pour les déconstruire.

Lorsque l’on parle de violences faites aux femmes il ne s’agit pas seulement des coups (visibles) il y a aussi ceux plus insidieux qui sont liés au sexe. Le fait d’être née femme est encore, aujourd’hui, un problème bien trop présent dans nos sociétés.

Si l’autrice Nigériane parle de la culture de son pays, on peut aisément faire un rapprochement avec la culture occidentale.


Commençons par l’une des principales idées reçues du féminisme : nous empêcher de trouver un mari : *« (…) j'ai écrit un roman sur un homme qui, entre autres, battait sa femme et dont l'histoire ne se termine pas bien (cf L’hibiscus pourpre). Alors que je promouvais le livre au Nigeria, un journaliste, un homme bien intentionné, m'a dit qu'il souhaitait me conseiller (…) Il m'a dit que les gens disaient que mon roman était féministe et son conseil à mon égard, était que je ne devrais pas m'appeler féministe car les féministes sont des femmes malheureuses car elles ne trouvent pas de mari. »(…)


Mais pour comprendre comment de tels conseils peuvent encore être assignés, il faut remonter plus loin. Il faut repartir à l’éducation des petites filles et des petits garçons :

(…) « Nous faisons beaucoup de tort aux garçons en les élevant ; nous étouffons l'humanité des garçons. Nous définissons la masculinité de façon très étroite, elle devient cette petite cage rigide et nous mettons les garçons dans cette cage. Nous apprenons aux garçons à craindre la peur. Nous apprenons aux garçons à craindre la faiblesse, la vulnérabilité. Nous leur apprenons à cacher qui ils sont vraiment car ils doivent être, comme on le dit au Nigeria, « des hommes durs ! (…) Nous faisons encore plus de tort aux filles car nous les élevons pour restaurer l'ego fragile des hommes. Nous apprenons aux filles à se rétrécir, à se diminuer, nous disons aux filles : « Tu peux avoir de l'ambition, mais pas trop». « Tu devrais avoir pour objectif de réussir, mais pas trop sinon tu menacerais l'homme.» Si tu es le gagne-pain dans ta relation avec un homme, tu dois prétendre ne pas l'être, surtout en public, sinon tu vas l’émasculer. » (…)


Cet extrait est très révélateur de la façon dont nous « programmons » encore trop souvent les petites filles dés la naissance. A force de leur apprendre à s’effacer et à ne pas faire de bruit, on fini surtout par leur apprendre à se taire. C’est pourquoi encore aujourd’hui si peu de femmes battues, violées, abusées, harcelées… décident de parler. Il est encore très compliqué pour les femmes d’expliquer leur souffrance et encore plus leur « non-action » : « si elle reste c’est qu’elle veut bien… » Ce genre de phrases assassines peut être aussi brutale qu’un coup de poing ou qu’une insulte, et continue d’emmurer les femmes dans leur silence. Trop souvent nos réactions sont injustes et ne prennent pas en compte la réelle victime : la femme.

(…) « Récemment, une jeune femme a été violée par un groupe dans une université, certains doivent le savoir. La réponse de nombreux Nigérians, hommes et femmes, était à peu près cela : « Oui, le viol est inadmissible. Mais que fait une fille dans une chambre avec quatre garçons ? » Si nous pouvons oublier l'horrible inhumanité de cette réponse, ces Nigérians ont été élevés pour voir les femmes comme coupables et pour en attendre si peu des hommes que l'idée d'être sauvages sans aucun contrôle est acceptable. Nous enseignons la honte aux filles. « Ferme tes jambes », « couvre-toi ». Nous leur donnons l'impression qu'en naissant femmes, elles sont déjà coupables. Les filles grandissent et deviennent des femmes qui ne peuvent pas voir qu'elles ont des désirs. Elles deviennent des femmes qui se font taire. Elles deviennent des femmes ne pouvant pas dire ce qu'elles pensent et elles deviennent -- c'est ce que nous leur avons fait de pire -- elles deviennent des femmes pour qui le faux-semblant est un art. »


Pour finir je voudrai citer un autre extrait, issu d’un talk TEDX que Chimamanda Ngozi Adichie avait donné en 2009 sur « the danger of a single story » que l’on pourrait traduire par « le danger de l’histoire unique » :

"Les histoires peuvent briser la dignité d'un peuple. Mais les histoires peuvent aussi réparer cette dignité brisée.(...) Quand on refuse l'histoire unique, quand on se rend compte qu'il n'y a jamais une seule histoire à propos d'un lieu quel qu'il soit, nous retrouvons une sorte de paradis »


Pour que ne puissions enfin rendre la liberté de parole à celles qui en ont besoin, il serait temps de changer de paradigme. Remettons la femme à sa place : celle de l’autre moitié de l’humanité, et pas simplement un objet de désir.

Ré-écrivons ensemble l’histoire des femmes.




Tous les extraits cités sont tirés du talk TEDX de Chimamanda Ngozi Adichie « We should all be feminists » donné en 2012, qui donnera le manifeste du même nom sorti en 2015.

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